Interview




Les interviews de Marta Lock :

"Valérie Arvalys, un style Art nouveau pour rappeler

la beauté et l'élégance d'autres temps"



Le destin se dessine parfois dès les premières années de la vie, car l'environnement dans lequel on a le privilège de naître a le pouvoir d'ouvrir les portes de la créativité et de la possibilité de réaliser ses rêves ; fille de l'art, Valérie Arvalys a littéralement grandi au milieu des couleurs et de la térébenthine puisque son grand-père, peintre impressionniste, et son père, de style réaliste, l'ont gardée près d'eux pour lui inculquer cet amour de l'expression figurative qui a d'ailleurs jeté les bases de tout ce qu'elle a fait tout au long de sa vie. L'école de communication visuelle de Beaubourg à Paris et le groupe de peintres avec lesquels elle a participé à diverses expositions lui permettent de se confronter à une variété de styles, parmi lesquels elle saura plus tard vers lequel s'orienter car plus proche de sa personnalité et de son amour de l'esthétique et de l'harmonie des formes. L'Art nouveau et l'Art déco sont les deux faces de sa médaille expressive, le premier pour la possibilité de s'étendre à divers domaines tels que l'architecture, les décorations en verre artisanal, les bijoux, les affiches, le fer forgé, donnant à ses créations une empreinte unique et personnelle, le second pour l'élégance et le glamour qui le caractérisent, ainsi que pour l'opulence des détails toujours au premier plan dans les œuvres d'Arvalys.. Mais la touche qui la caractérise peut-être le plus est sa polyvalence d'exécution, tant du point de vue des matériaux avec lesquels elle crée ses œuvres, comme les couleurs acryliques, les bijoux, les pierres, les fleurs séchées, les plumes, les tissus, le cuir, le métal et l'argile, que des supports qui changent selon l'impulsion du moment, de sorte que ses œuvres peuvent être sur toile, sur bois, sur tissu, sur métal et sur verre. Et puis une personnalité expérimentale comme la sienne doit aussi se mesurer à différents types de communication visuelle, de la peinture à la sculpture, de la photographie à la poésie, car un esprit aussi libre et éclectique ne pourra jamais s'inscrire dans un schéma défini et donc limitatif. Ce que Valérie Arvalys souhaite à travers ses œuvres, c'est communiquer la positivité, rappeler à l'observateur que la beauté et la magnificence sont des éléments essentiels de la vie parce que l'être humain a toujours été attiré par elles et parce qu'elles ont un effet régénérateur sur notre intérieur ; en cela aussi, l'artiste brise le moule selon lequel la surface scintillante contraste avec une attitude plus profonde, plus introspective. Au contraire, pour elle, c'est précisément à travers l'harmonie esthétique, la grâce et l'opulence que l'âme peut trouver soulagement et plaisir même dans les moments les plus complexes. En effet, il est impossible de ne pas se plonger dans l'atmosphère de la Belle Époque en regardant ses œuvres, en imaginant une approche différente de la vie, peut-être moins existentialiste, mais certainement plus orientée à profiter de toutes les choses agréables que l'existence a pu lui offrir. Dans l'œuvre L'envol, la femme semble accompagner doucement le vol de l'hirondelle, la laissant s'éloigner malgré l'affection et la protection qu'elle lui a apportées jusqu'alors ; il n'y a pas de sentiment de possession chez la protagoniste féminine, loin de là, elle accepte avec amour que l'être dont elle s'est occupée prenne son propre chemin de liberté et d'autonomie. On perçoit presque la suggestion subtile de Valérie Arvalys de ne pas vouloir posséder un autre être vivant ; ce sur quoi on peut penser avoir un quelconque pouvoir n'est qu'un objet, quelque chose que l'on peut acquérir et qui relève de la sphère de la propriété. Dans le tableau L'iris bleu, l'artiste montre tout son penchant pour l'Art déco, cette opulence de détails et de gamme chromatique capable d'envelopper l'observateur qui se trouve devant l'œuvre, séduit par l'élégance et le raffinement qui évoquent des atmosphères rétro, fasciné par le plumage de l'animal en parfaite harmonie avec la couleur prédominante du fond et la broderie qui l'enrichit, comme si, d'une certaine manière, la nature était à l'aise dans cette élégance qui caractérise l'environnement raconté par l'artiste. Les figurations zoomorphes et florales s'inscrivent parfaitement dans les lignes directrices de l'Art nouveau, que Valérie Arvalys réinterprète avec un style personnel et tout à fait reconnaissable. Découvrons maintenant cette artiste originale.


Valérie, vous avez eu la chance de naître dans une famille d'artistes, combien est-il essentiel pour un enfant d'avoir sous les yeux une réalité dont certains pensent qu'elle n'appartient qu'aux rêves ? A-t-il été avantageux pour vous de pouvoir apprendre les secrets de l'art avant d'entreprendre des études spécifiques ? Avez-vous été encouragé par votre famille ou vous a-t-on déconseillé de poursuivre une carrière complexe et souvent incertaine ?

C'était très enrichissant pour moi de caresser les oeuvres si colorées de mon grand-père, comme celle-ci débordant de vérité et sentant la peinture acrylique qui me donne à chaque fois envie de la toucher, comme un enfant mettant sa main dans un pot de chocolat. Quant à mon père avec ses œuvres figuratives et cette térébenthine m'a transporté dans des lieux plus anciens, en souvenir de Jean de la Fontaine. Leurs deux univers m'ont inspiré poétiquement. Parfois avec du jazz en fond sonore, parfois avec de la musique classique. Une suspension dans le temps, une caresse pour mon âme. Je voudrais conclure en disant que l'art n'est pas un rêve. Il faut l'essayer, c'est à la portée de tous. Pourtant, il est essentiel de travailler encore et encore pour trouver sa voie artistique. Connaître les secrets fascinants de la peinture m'a aidé à entrer dans une école d'art où l'amour de la couleur et savoir intuitivement comment la combiner a été noté. Ce fut un réel plaisir de compléter mes connaissances et d'acquérir de nouvelles techniques picturales, de la nature morte au modèle vivant et du graphisme au design. Ma famille a apprécié ma créativité et l'harmonie des couleurs de mes peintures. Ils m'ont toujours encouragé. Cependant, pendant plusieurs années, j'ai eu une autre profession en même temps, car l'art ne suffisait pas à me soutenir. Aujourd'hui je m'y consacre davantage, ayant plus de temps libre et ayant trouvé un style qui me ressemble, en accord avec ma personnalité et mes goûts artistiques. Maintenant, je peux offrir au public un voyage plus riche dans lequel il peut être impliqué et excité.


Vous avez opté pour un style d'expression très particulier que peu d'artistes contemporains choisissent comme marque de fabrique, quelle a été la raison de votre décision ? Quelle est l'importance de rester en contact avec la beauté et la sophistication dans la société d'aujourd'hui ?

Un artiste doit se sentir libre d'expérimenter différentes techniques car son essence est la création elle-même, donc je ne suis pas intéressé à suivre une direction similaire à celle des autres. Nous, artistes d'aujourd'hui, sommes constamment influencés par le monde qui nous entoure et par l'âme des grands artistes, des grands mouvements du siècle dernier. Alors en fait plus que de choisir un style, je me laisse porter par ma nature, créant avec une approche très personnelle, en phase avec l'histoire de l'art et enrichie par le monde d'aujourd'hui. Chacune de mes créations surgit spontanément après avoir goûté à l'univers culturel que j'affectionne. J'écoute simplement mon cœur et ce que j'aime : l'amour de la nature, l'amour d'un Art Nouveau si luxuriant, d'un Art Déco si graphique et si inattendu, qu'il caresse ma fibre poétique et artistique. La beauté est relative d'un continent à l'autre, et le raffinement superficiel. Je recherche avant tout l'harmonie : celle des couleurs, des formes, des pierres, de la nature, et la manière dont leur singularité s'inscrit dans l'ensemble.

Le monde d'aujourd'hui est difficile, même si en d'autres temps il aurait pu l'être encore plus. Pouvoir apporter harmonie et élégance à notre monde, c'est apporter une petite contribution au meilleur de chacun et stimuler une compréhension plus positive de la vie. Pouvoir transmettre des ondes positives et régénérantes, et pouvoir utiliser mon art pour faire comprendre aux gens l'importance d'être qui nous sommes plutôt que de devenir ce que nous possédons, telle est ma mission artistique.


Votre particularité est d'avoir introduit la matière dans un langage stylistique lié à l'origine à une technique de peinture plus traditionnelle ; quelle est l'importance pour vous de pouvoir vous mesurer aux matériaux qui composent vos œuvres ? Pouvez-vous nous parler de vos expériences avec les autres manifestations artistiques avec lesquelles vous vous mesurez habituellement ? Comment parvenez-vous à passer si facilement d'un support à l'autre, comme le verre ou le métal ?

Mes créations sont spontanées dans la ligne, mais les applications des divers éléments se reflètent donner du sens, une émotion poétique et attirer le spectateur. Les titres de mes tableaux ils ont un sens. J'ai aussi des choses à dire, à transmettre, à laisser échapper. Le dénominateur commun de mon parcours artistique est le graphisme Vitrail. Mon art a évolué au fil du temps et à travers diverses expériences, découvrant mon monde intérieur, ce que je voulais dire et exprimer à travers le graphisme, les matériaux et les supports. Au fur et à mesure que le chemin se poursuivra, mon art évoluera certainement. J'aime ajouter à mon travail tous les éléments qui me passionnent. L'acrylique de mon grand-père; le figuratif, l'art classique de mon père et l'esthétisme qu'il a su développer en moi ; les pierres dont les vertus et les énergies ont du sens ; l'argile que j'aime tant caresser et qui est si sensuelle ; les éléments de joaillerie qui me font penser au fer forgé ancien ; la mosaïque qui me fait voyager dans les pays orientaux et évoque l'acceptation de la singularité de chacun ; miroirs pour attirer le spectateur; le bois, qui évoque la force de la nature, que je sculpte parfois ; la dentelle, qui ramène aux temps passés. N'ayant ni l'espace ni le matériel pour faire du vitrail, j'ai cédé à ce désir en cherchant différentes façons de le présenter. J'ai commencé par des graphismes pointus, des acryliques entourant les formes de noir, puis de la peinture vitrail mais appliquée sur toile, et enfin cette dernière méthode. On pourrait dire que mes peintures sont des peintures sculpturales, des peintures bijoux, comme quelqu'un les définit. J'apprécie l'artisanat et créer ce style est en quelque sorte un hommage aux artisans. Quant aux autres moyens d'expression, la poésie est entrée dans ma vie grâce à mon père, érudit et amateur de littérature, d'histoire et de poésie. Jean de La Fontaine l'a inspiré pour une série de tableaux tandis que j'exprime la poésie dans mes oeuvres en toile de fond. L'écriture m'a toujours attiré. J'ai pu mettre mes sentiments sur papier, philosopher dans un style qui est en rapport avec mon inspiration du moment. La sculpture, en revanche, est pour moi un travail d'artisanat d'art. J'ai suivi des cours avec un maître allemand et réalisé quelques oeuvres en argile, d'une part des modèles vivants, d'autre part des personnages très expressifs dans un style spontané. Caresser l'argile me procure une sensation de bien-être infini ; de la matière est ajoutée pour évoquer une forme, et l'œuvre se matérialise dans les mains et devant le regard. Lorsque j'entre en contact avec le bois, un autre voyage commence, ainsi que la sculpture sur pierre, que j'aimerais pratiquer. Ces deux matières ne se trahissent pas et la main qui les façonne ne peut les apprivoiser complètement. Elle ne peut que les accompagner vers ce qu'ils sont, ce qu'ils disent. Le respect de la matière façonnée et sa compréhension sont essentiels pour moi. Aujourd'hui je suis dans une phase de recherche, d'un style qui me correspond plus. La photographie me permet de comprendre la vie qui m'entoure au-delà de l'image et de fixer ma vision artistique et picturale dans un instant précis avec mon regard. C'est le reflet d'une réalité, la nôtre. Et c'est ce qui rend la photographie intéressante. Il m'inspire également dans mes peintures. J'observe beaucoup la nature, la forme des fleurs, des plantes, des insectes, mais aussi l'architecture, l'expression des visages et des personnes.

Et enfin j'ai étudié la danse pendant sept ans, passant du conservatoire classique au monde du jazz moderne. Mon désir, avant toutes les pratiques artistiques que je mène aujourd'hui, était de devenir danseur professionnel, chorégraphe. Cela m'aurait permis de contribuer à la création de quelque chose de nouveau, cependant certains problèmes de santé m'ont empêché de continuer dans cette voie, mais ma personnalité créative et artistique ne pouvait pas rester sur des pensées négatives, et la créativité m'appelait au plus profond de mon être. J'ai donc essayé de donner libre cours à ce côté de moi de mille autres manières. A mon avis, toutes mes expressions artistiques compensent l'impossibilité de réaliser mon premier rêve, celui de danser. Je peux passer d'une technique à l'autre assez facilement, car tout part de l'envie de faire et de transmettre. Je suis passionnée par toutes les matières et en particulier celles définies comme nobles comme la pierre, le bois, la terre, le fer forgé, le cuir, la soie, le verre. Aujourd'hui je suis passionné par cette technique, demain ça pourrait être une autre, ou une version améliorée. Parce que l'art est vivant et libre, comme moi.


En parlant d'Art déco, on ne peut s'empêcher de penser à Tamara de Lempicka, mais votres œuvres semblent être une nouvelle direction, un mélange original d'un Art déco plus tropical qu'européen et d'un Art nouveau de la fin du 19e siècle. Quels sont les artistes qui vous ont inspiré ? De quels artistes vous sentez-vous le plus proche sur le plan stylistique ?

Vous mentionnez Tamara de Lempicka, qui a été une source d'inspiration pour moi pendant mes études d'art. J'apprécie son travail pour ses personnages et ses femmes si féminines aux formes tantôt brutes, tantôt rondes, envoûtantes, accompagnées de couleurs profondes qui évoquent avec brio les tissus de soie et de velours. Mais il y a aussi Klimt pour son originalité à mêler le figuratif classique avec des personnages laissés quasiment en retrait au profit du décor, des éléments décoratifs floraux, entre autres, scintillants d'or et des couleurs vives, très détaillées, qui animent ses œuvres comme un ecrin; Mucha, plus particulièrement dans sa période graphique, avec ses femmes rondes élégantes et poétiques, accompagnées d'ornements végétaux typiques de l'Art Nouveau. Mon inspiration vient aussi des vases et bijoux de Lalique, de l'art urbain et métropolitain ainsi que de l'architecture d'Hector Guimard et du mobilier inspiré de lui ; Emile Gallé et ses vases poétiques. D'une manière générale, mon inspiration vient de toutes les formes graphiques, qu'elles soient architecturales, bas-reliefs, verreries et vitraux divers, sculptures modernes, sculptures classiques ou primitives ; de toutes les formes artistiques : musique, nature, danse, philosophie, histoire et poésie, mon environnement, mais surtout les sentiments et les belles émotions qui en découlent. Les maîtres dont je me sens le plus proche sont Mucha, Klimt et Guimard.


Vous participez activement à des expositions collectives et à de grandes foires d'art en France et à l'étranger : quels sont vos prochains projets ?

J'aime partager mon travail avec le plus de monde possible. L'art doit être universel et pour tous. De juillet à août je serai en exposition personnelle dans le jardin du musée Bourdelle à Egreville où j'exposerai une vingtaine de toiles. En septembre, à la galerie Thuillier au Salon de la rentrée mes oeuvres feront l'objet d'une exposition collective, puis en octobre je participerai à la foire internationale d'art contemporain ARTSHOPPING, au Carrousel du Louvre.

Depuis quelques mois j'expose également à la galerie Roz In Winter à Barbizon, lieu mythique de la peinture pré-impressionniste. Je continue à travailler sur de nouvelles peintures et, en parallèle, j'envisage de publier un livre sur mon art. J'envisage également de transformer mes œuvres en vitraux, bas-reliefs et sculptures. Le maître-mot de mon parcours artistique est le partage. Car l'essence de l'art et l'âme de l'artiste n'existent pas si elles ne sont pas partagées. L'âme d'une œuvre est le reflet de son créateur, de l'innovateur.



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